Chapitre 57 : le signal radio

Publié le par RoN

Quelques heures à dormir et fumer plus tard, les dernières traces de Ghoulobacter s’étaient évanouies du corps de Jack et il pu enfin recevoir des visites. Béate et Roland avaient déjà raconté les grandes lignes de leur aventure à tout le monde, mais nombreux furent ceux qui voulurent connaître les détails de son affrontement monumental contre les goules. En particulier les enfants, qui ne cachèrent pas leur admiration quand leur maître d’arme leur expliqua de quelle manière il avait réussi à triompher de soixante monstres anthropophages. La belle Gina fut en revanche moins enthousiaste. Morte d’inquiétude durant les quelques jours qu’avait duré l’expédition, ce n’étaient pas ça qui allait la réconforter. Jack fit néanmoins de son mieux pour la rassurer. De toute manière, il savait maintenant qu’il ne courait plus le risque de devenir un zombie.
La jeune femme l’interrogea également à propos d’Aya. Même si cela était assez dégueulasse, elle n’avait pu s’empêcher d’éprouver du soulagement en voyant que Jack ne l’avait pas retrouvée. Au fond, elle savait que le cœur du jeune homme appartenait toujours à la philosophe disparue, et elle craignait que Jack ne la laisse tomber le jour où ils se retrouveraient. Celui-ci ne savait pas quoi lui répondre. Il gardait toujours espoir de revoir sa bien-aimée un jour, mais d’un autre côté, il éprouvait une grande tendresse pour la jeune institutrice qu’il avait aidée à accoucher. Quoi qu’il arrive, il ne l’abandonnerait jamais. Mais c’était la seule chose qu’il pouvait lui promettre.
« Je t’aime énormément, lui dit-il, mais je ne peux pas abandonner celle qui s’est sacrifiée par amour pour moi…
-    Je comprends. Je ne t’embêterai plus avec ça. Quoi que tu choisisses quand tu retrouveras Aya, je l’accepterai. Mais en attendant, je suis là, alors profites-en. »
Le jeune homme lui sourit et ils s’embrassèrent longuement, heureux de se retrouver. Comme tant d’autres personnes, la jeune femme comptait sur lui, et il s’en voulut d’avoir si facilement mis sa vie en jeu lors de l’expédition. Mais l’important était qu’il soit revenu en vie, même si cela tenait du miracle.
Jack eut ensuite une longue discussion avec le colonel Amagi. Celui-ci voulait savoir exactement comment ses trois hommes étaient morts, et le jeune homme lui donna le plus de détails possibles. Il mentionna également leur rencontre avec « l’armée de Pavilion » et les groupes de goules de plus en plus importants.
« Ici, on est à peu près tranquilles, conclut-il. Mais il y a toujours un risque pour qu’une de ces hordes tombe sur la base, ou nous attaque lors d’une sortie ravitaillement. Ca risque de devenir un problème de plus en plus important… »
Le colonel était bien de son avis. Ils n’étaient même pas une vingtaine dans le camp, et malgré la quantité d’armes dont ils disposaient, leurs forces étaient inévitablement limitées. Les grilles qui entouraient la base pouvaient arrêter les infectés communs, mais elles seraient dérisoires faces à une attaque d’évolués. Si jamais une horde les trouvait, ils ne tiendraient pas bien longtemps.
La seule solution pour anticiper ces attaques en masse était le nombre. Une cinquantaine d’hommes armés et bien entraînés pourraient sans doute venir à bout de plusieurs centaines de monstres, si une telle situation se présentait. Et dans la base d’Adams, il y avait largement assez de place pour accueillir une centaine de personnes supplémentaires. Le colonel y pensait depuis un certain temps déjà.
« Les goules deviennent de plus en plus fortes, de plus en plus intelligentes, et à ce que tu me dis, de mieux en mieux organisées. Si on reste seuls, ce n’est qu’une question de temps avant qu’on se fasse éradiquer. Et c’est valable pour tous les êtres humains de ce pays. En petits groupes, on n’a aucun avenir.
-    Tu as entièrement raison, colonel. Il  faut absolument qu’on trouve le moyen de réunir du monde. Mais parcourir les routes au hasard en appelant à la radio est beaucoup trop risqué…
-    Pas besoin de se déplacer. L’antenne de cette base peut émettre à des centaines de kilomètres. Le seul problème, c’est que notre radio est grillée. Je voulais donc te demander l’autorisation de réquisitionner la votre.
-    Merde, mais c’est même pas la peine de poser la question ! s’écria Jack en éclatant de rire. Ah, ces militaires ! »
Sitôt dit, sitôt fait. Lloyd Bronson mit en pratique ses quelques compétences en électronique pour raccorder la radio qu’ils avaient récupéré dans l‘église du père Sourcier à l’antenne de la base d’Adams, et dès le lendemain, ils commencèrent à envoyer des messages de rassemblement. Il fallait se montrer le plus convaincant possible pour espérer faire venir des gens. Lors de leurs péripéties sur les routes, les étudiants s’étaient bien rendus compte que les survivants étaient peu enclins à abandonner la sécurité relative de leurs abris. Mais celle-ci était illusoire. Des portes et des fenêtres barricadées constituaient un obstacle ridicule pour les puissants évolués. Tôt ou tard, les survivants reclus attireraient l’attention des monstres, et il ne leur faudrait pas beaucoup de temps pour tous les contaminer. C’est bien ce qu’ils expliquèrent dans leurs messages radio, insistant sur le fait qu’eux disposaient de beaucoup d’armes, de nourriture et d’une relative tranquillité dans cette base perdue en pleine forêt. Ils osèrent même annoncer que des scientifiques y travaillaient dans le but de mettre au point un remède contre l’infection. Ce qui était vrai, finalement. Mais leurs recherches avançaient très lentement.
Comme Jack et Marie l’avaient espéré, le disque dur du professeur Lyons contenait bien les données génétiques de la bactérie. Dans la soirée qui avait précédé sa transformation, le chercheur avait même tenté de classifier la Ghoulobacter. Mais ses anciens étudiants réalisèrent bien vite que cela ne menait nulle part : le génome de la bactérie ne donnait aucun indice sur son origine. Cette saloperie ne ressemblait à rien de connu, et les scientifiques finirent presque par penser qu’elle était d’origine extraterrestre. Bien entendu, rien ne permettait d’étayer cette théorie. Mais le fonctionnement et la nature même de cette bactérie étaient si éloignés des autres organismes de cette planète que cette hypothèse était très tentante. Cela n’avait de toute façon que peu d’intérêt, ne les avançant pas plus dans la quête d’un remède à l’infection.
Tandis que Marie et le docteur Church menaient ces investigations infructueuses, Jack se remettait doucement de ses blessures, reprenant les leçons qu’il donnait aux enfants. Il avait acquis énormément d’expérience dans le domaine des affrontements avec les goules, et les gosses l’écoutaient toujours avec beaucoup d’attention. Bien plus que celle qu’ils accordaient aux cours de Gina, pourtant d’une importance toute aussi grande. Arvis Bronson, qui n’avait plus qu’un seul bras pour combattre les zombies, était lui aussi très attentif à ce que Jack pouvait lui apprendre. Il était un peu jaloux de l’admiration et la fascination qui brillaient dans les yeux de sa petite amie quand elle leur parlait de Kenji le tueur de goules. Le jeune Bronson se sentait obligé de devenir fort malgré son handicap, de se surpasser pour impressionner sa belle. Et après tout, ce n’était pas un mal. Avec le danger que représentaient les évolués, mieux valait être préparé au pire, en particulier si l’on n’avait qu’une seule main pour se défendre. Mais le plus important était de constituer un groupe conséquent.
Aussi les survivants se relayaient-ils presque constamment à la radio. Ils n’avaient pas le matériel nécessaire à la diffusion d’un message enregistré, et il était de toute façon préférable de faire participer tout le monde. D’une grande éloquence, le colonel Amagi passait beaucoup de temps à parler à la radio, mais chacun eut l’occasion d’exposer ses arguments sur l’intérêt d’un regroupement.
Et à peine quelques jours après cette initiative, les survivants commencèrent à arriver à la base d’Adams.

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